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12 janvier 2019

Ces autos pour connaisseurs (14) - Fiat Panda 100 HP Sport : des chevaux à la place des hauts-parleurs

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De nos jours, lorsqu’on évoque un modèle Fiat dans la presse spécialisée, il est fréquent de lire des assertions comme image dégradée ou potentiel incertain en collection. Et, il faut bien en convenir, la réputation de l’entreprise a connu une très nette déliquescence depuis la fin des années 1980. On pourrait rédiger un livre tout entier pour détailler les origines de ce phénomène, qui sont multiples et bien connues : plan-produit erratique, écoute insuffisante du marché et des attentes de la clientèle, incapacité à valoriser des innovations techniques pourtant bien réelles, le tout symbolisé par une évolution stylistique veuve de toute cohérence. Au point de dévaluer les quelques soubresauts créatifs ayant survécu au naufrage, au milieu de nombre de créations oubliables comme la Stilo, ou les Bravo et Croma de seconde génération (voir notre article).

La première Panda : un jalon historique

À cet égard, le destin de la Panda s’avère particulièrement instructif de par le violent contraste existant entre la première génération du modèle et ses deux successeurs — rappelant à quel point il est difficile de concevoir la descendance d’une automobile lorsqu’elle s’extirpe de la modestie de son rôle initial pour incarner un style de vie, voire une époque, et s’inscrire durablement dans la mémoire collective. La première Panda de 1980, aussi techniquement archaïque qu’admirablement dessinée par un Giugiaro qui signa là l’une de ses créations les plus marquantes, correspond, avec le recul du temps, à un authentique coup de génie. Géométrie et lisibilité des formes, intelligence générale de l’architecture, modularité exemplaire de l’habitacle — ou comment élaborer une voiture populaire sans qu’elle soit pour autant dévalorisante pour l’acheteur qui, au contraire, peut y trouver le relais d’une certaine joie de vivre. Quelque chose comme le concept de la célèbre étagère Billy adapté à l’automobile… L’imagination, c’est comme la beauté, ça ne coûte pas un sou de plus au stade de la conception (que les heureux possesseurs de Dacia Logan veuillent bien nous pardonner).

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Le moins que l’on puisse écrire, c’est que les clients ont plébiscité la proposition : avec plus de cinq millions d’exemplaires écoulés en vingt-trois ans de production, le succès de l’auto s’est apparenté autant à un motif de réjouissance qu’à une source d’embarras pour son constructeur ; il est rarissime de parvenir à prolonger une telle réussite, surtout lorsque l’atypisme originel est synonyme d’un effet de surprise par définition impossible à reproduire. C’est ainsi qu’au salon de Bologne, en décembre 2002, les observateurs purent assister à la première traduction concrète d’une gestation à l’évidence douloureuse, à un moment où, une fois de plus, l’avenir du constructeur italien suscitait davantage de craintes que d’espoirs, et où les plans marketing fertiles en annonces aussi flamboyantes qu’irréalisables étaient déjà une spécialité piémontaise au même titre que les Agnolotti ou la Panna cotta...

Un changement radical d'apparence

Baptisé Simba en une référence waltdisneyesque qui en disait long quant à la philosophie globale de l’engin, le concept-car bolonais n’était pas saoul mais avait choisi un chemin courageux. Il aurait été facile de sombrer dans un plagiat forcément édulcoré de la première version et de se contenter d’actualiser mollement une idée novatrice (c’est exactement le piège dans lequel Renault est tombé avec la Twingo II). Au lieu de quoi, les responsables du projet adaptèrent très opportunément leur approche en tenant compte des mutations du marché et des modes de vie de la clientèle visée. Un quart de siècle plus tard, celle-ci n’entretenait évidemment plus les mêmes rapports que ses aînés avec la notion de rusticité chère à la Panda première mouture. Dès lors, il fallait définir un équilibre — forcément délicat — entre l’admirable simplicité qui, ayant forgé son identité, se trouvait aux prolégomènes de la voiture, et l’indispensable adaptation aux exigences de la modernité.

Toutefois, la longue valse-hésitation quant au nom même du futur modèle a trahi l’ampleur du tracas de ses auteurs. Prévue pour s’appeler Small (un nom typiquement italien…), puis Gingo (une appellation énergiquement contestée par Renault, pour des motifs aisément compréhensibles), la voiture finit par revenir au bon sens le plus élémentaire et s’inscrivit donc, en toute logique, dans une filiation revendiquée avec l’adorable cube à roulettes qui avait éclairé la jeunesse de tant d’étudiants fauchés. Lancée à l’automne de 2003, et douteusement auréolée du titre de Voiture de l’année, la nouvelle venue ne pouvait que susciter la curiosité, y compris de ceux pour qui l’automobile se réduit à une vocation strictement utilitariste.

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S7-PANDA-PROFIL-photo10787-37870Avec la Panda II, un changement esthétique radical s'est opéré par rapport à sa devancière...

Disons-le tout net, bien qu’elle ait bénéficié d’un style assez personnel, il fut dès l’abord évident que la Panda II n’allait pas marquer les esprits dans les mêmes proportions que sa devancière. Uniquement disponible en cinq portes, sa carrosserie allait délibérément puiser son inspiration dans les impératifs d’une certaine praticité : rapport encombrement/habitabilité optimisé, hayon vertical, vitrages généreux, à quoi s’ajoutait une forme de sincérité bienveillante, assez éloignée pour tout dire des grandes tendances qui, déjà, sous-tendaient le comportement d’un grand nombre d’acheteurs ; à une époque où il devenait de plus en plus difficile de se singulariser par la puissance ou la vitesse, il s’agissait de compenser par une esthétique souvent agressive et évocatrice de performances et de sportivité : réduction des surfaces vitrées, brutalisme gratuit des lignes, accessoires censés suggérer le dynamisme, mais souvent factices (telles les caricatures de diffuseurs logés sous les boucliers arrière)… Autant de jalons volontiers freudiens et auxquels la petite Fiat tournait résolument le dos, même dans la version qui nous occupe aujourd'hui, qui ne verse pas dans l'outrance esthétique pour se distinguer de ses soeurs plus modestes.

Une inédite version dynamisée

Car oui, si la reconduction de la très appréciée version 4x4 était attendue, le lancement, fin 2006, de la version 100 HP constitua une réelle surprise. La dénomination retenue, anachronique dans une époque où l’on n’indiquait plus par ce biais, depuis l’Autobianchi A112 Abarth 70HP, la puissance développée, tristement anonyme et incapable de souligner valablement les ambitions de cette nouvelle variante, avait cependant le mérite de clarifier immédiatement les choses : cent chevaux-vapeur dans une Panda, c’était un peu comme si Citroën avait installé un groupe mototracteur de CX Reflex dans une 2CV Club… Et c’est d’ailleurs ce qui confère tout son sel à cette version, aussi incongrue qu’attachante, et dont la survenue demeure aujourd’hui encore assez mystérieuse. Quel était donc le but recherché ? Améliorer l’image du modèle ? Dans ce cas, il fallait mener la démarche jusqu’à son terme et lui accorder le logo Abarth (ainsi qu’une poignée de chevaux supplémentaires le cas échéant), ou encore, l’appellation Sporting déjà rencontrée sur les deux premières générations de Punto mais aussi sur les Cinquecento et Seicento, et évocatrice de dynamisme bon marché plus que de sportivité débridée, deux badges qui, a priori, auraient été pleinement légitimes dans le contexte.

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car_photo_218202La puissance affichée sur la voiture : un signe délicieusement désuet !

A priori seulement car, compte tenu de la prédestination de la Panda, principalement conçue à l’intention de conducteurs paisibles, avant tout soucieux de fonctionnalité et d’économie d’usage, on peut imaginer sans peine qu’aux yeux de ceux-ci un gain significatif sur le 1000 mètres départ arrêté revêtait une importance moindre que les décimètres-cubes disponibles une fois la banquette arrière rabattue. Et, il faut lui rendre cette justice, la 100 HP ne s’était pas contentée de s’accaparer les services d’un moteur plus puissant que ses sœurs de gamme. Assez joyeusement animée par le 1368 cm3 seize soupapes maison, l’auto recevait également le renfort d’une boîte à six vitesses — dont l’étagement judicieux avait de quoi faire rêver les conducteurs de BMW 325i E30 — et de trains roulants adaptés à ce surcroît de puissance qui, pour demeurer dans les limites du raisonnable, avait toutefois de quoi donner le sourire à n’importe quel conducteur matinal, prenant la route dans la solitude et le froid d’une journée d’hiver et réveillant une mécanique typiquement italienne dans sa contenance. Par ailleurs, davantage pour l'anecdote qu'autre chose, cette version remplaça la touche City qui allégeait la direction sur les autres versions par une touche Sport qui, cette fois, la raffermissait et rendait plus franche la réponse à l'accélérateur.

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La touche "Sport" permet d'accroître le ressenti dynamique mais ne transcende évidemment pas la voiture...

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Cent chevaux dans une tonne avec un caractère enjoué.

 

Néanmoins, à ce stade il convient de préciser qu’il suffit de négocier quelques virages sur n’importe quelle route de la vallée de Chevreuse au volant de l’engin pour comprendre que la partie cycle est insuffisamment aboutie pour lui permettre de jouer les sportives authentiques. On est évidemment assez loin des sautillements des premières Panda 45, juchées sur un essieu arrière à peine digne d’une camionnette d’avant-guerre, mais les qualités routières de l’ensemble s’apparentent bien davantage à celles d’une citadine performante que d’une GTi ou assimilée. Cela étant posé, la voiture demeure très agréable à mener, la transmission permettant d’exploiter au mieux les capacités du moteur qui, pour être sensiblement moins démonstratif que celui d’une Uno turbo i.e., fait preuve d’une indéniable bonne volonté.

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Polyvalence et dynamisme plus que sportivité débridée

A défaut du caractère brutal de cette dernière ou de sa descendante un brin plus civilisée, la Punto GT, il ne faut pas espérer un tempérament explosif fait de coups de pied aux fesses et de fréquentes pertes de motricité : la Panda 100 HP est une variante gentiment dynamique, qui propose un moteur pétillant et une homogénéité à l’usage dont ne peuvent pas forcément se prévaloir les deux turbulentes citadines suralimentées citées précédemment. La Panda 100HP repose davantage sur le modèle de ce que proposent une Citroën C2 VTR, une Renault Twingo GT 1.2 TCe ou une Ford SportKa. D’ailleurs, un simple coup d’œil sur ses chiffres des performances ne peut que confirmer que nous n’avons pas affaire à un missile sol-sol : avec un peu moins de dix secondes au 0 à 100km/h et le 1000m départ arrêté en trente-deux secondes, nous sommes dans le registre de la vivacité entre deux feux tricolores plus que dans celui de la chasse au chrono sur le circuit Bugatti du Mans… cela dit, ces chiffres font de la 100 HP la seule version de la gamme Panda à pouvoir s’aventurer hors des centres urbains sans tirer la langue au moindre faux plat : les 1.1L et 1.2L Fire ne peuvent en dire autant. Mais au fond, peu importent les chiffres : la Panda 100 HP est l’une de ces autos qui vous rendront gai comme un italien quand il sait qu’il… enfin bref, vous nous avez compris.

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Comme on pouvait s’y attendre, la 100 HP ne représente qu’une faible proportion des quelque deux millions de Panda II tombées de chaînes jusqu’en 2012, date à laquelle la voiture a été à son tour remplacée par un nouveau modèle se bornant à une profonde remise à jour de son prédécesseur et abandonnant, cette fois, toute velléité sportivo-dynamique, ce qui renforce encore la rareté et l’intérêt de cet accident de l’histoire… En trouver une à vendre en France n’est cependant pas très difficile, et une enveloppe comprise entre 3500 et 4500 euros devrait vous permettre de repartir au volant d’une auto fréquemment méprisée par le vulgum pecus à cause de son blason, mais pourtant pétrie de qualités, véloce sans être dispendieuse ni renoncer à une polyvalence toujours bienvenue !

 


Nicolas Fourny & Anthony Desruelles

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